En quoi la symphonie « Jupiter » vous enthousiasme-t-elle ?
Elle est pleine de charme et on se laisse facilement emporter par son élan et par la maitrise musicale que Mozart exprime. J’espère que le public sera surpris par la vivacité des contrastes de notre interprétation. Rien que dans les deux premières mesures, on entend à la fois une irrésistible fanfare et une mélodie douce et caressante. Notre but est de faire ressortir chaque trait de la musique de Mozart. Il en a mis beaucoup dans cette œuvre !
Vous dirigerez également le Concerto pour clarinette. Qu’est-ce qui vous plaît dans cette pièce ?
C’est une autre œuvre superbe, composée par Mozart à la fin de sa vie. Le public appréciera sa virtuosité et sa délicatesse par le biais de notre soliste Pierre Génisson. Je suis particulièrement touchée par les longues phrases du deuxième mouvement qui se déploient comme une arche. Sublime !
Que ressentez-vous avec Mozart ?
Interpréter la musique de Mozart, c’est créer de l’énergie, du chant et des ensembles dans la forme la plus pure et la plus parfaite. C’est une musique qui demande une attention constante. Pour la jouer la plus naturellement possible, il faut l’étudier de manière très approfondie. Et c’est un voyage finalement joyeux et enrichissant pour tous. J’adore interpréter sa musique et j’ai hâte de collaborer avec l’Orchestre de l’Opéra de Rouen pour ce programme dédié à Mozart.
Vous avez découvert la musique grâce au violon, que votre mère et votre grand-mère jouaient avant vous. Votre approche musicale a été familiale et féminine…
Oui, mais j’ai eu ensuite la chance d’avoir de nombreux mentors musicaux inspirants, hommes comme femmes. Ma mère et mon père sont, en tout cas, toujours très proches de moi.
Comment voyez-vous le rôle du chef d’orchestre ?
Plus que tout autre métier musical, je pense que la clé de la direction d’orchestre est la communication, car notre « instrument » est l’ensemble des musiciens. Nous les rassemblons et créons un cadre leur permettant de jouer de leur mieux. Je ressens beaucoup de choses devant un orchestre. Souvent, c’est un mélange de calme, pour que la concentration et la clarté puissent être transmises aux musiciens, et aussi d’excitation, de passion et d’amour pour la musique, ce qui contribue à créer un environnement ouvert où les musiciens peuvent expérimenter, créer et jouer en se sentant soutenus.
En quoi la musique orchestrale vous fait-elle vibrer ?
Il y a un aspect spirituel de la musique orchestrale que l’on ressent fortement lorsque nous jouons et que nous sommes synchronisés. Je crois que jouer et écouter de la musique peut nous apporter un épanouissement profondément spirituel.
Propos recueillis par Vinciane Laumonier.
Entretien avec Thierry Malandain, chorégraphe.
Vous vous emparez de L’Oiseau de feu. Comment l’avez-vous travaillé ?
Je voulais rendre à l’Oiseau du conte originel sa spiritualité biblique de « passeur de lumière », à l’image de François d’Assise, un saint poète de la nature qui me fascine. Maurice Béjart avait fait de l’Oiseau un esprit de la révolution. Sur le même principe, j’en fais un esprit de la foi qui apporte consolation et espoir aux Hommes. Le premier ensemble, vêtu de noir, peut évoquer des gens d’église ou une simple communauté d’hommes parmi laquelle un individu est touché par le message de l’Oiseau. L’Oiseau meurt et son message reste vivant à travers les Franciscains, le ballet qui se met en mouvement.
C’est donc une pièce comme un chemin des ténèbres vers la lumière ?
Elle est, en effet, symbolique et parle d’espoir. Je l’ai écrite à la sortie de la pandémie, une période éprouvante qui appelait à une forme de libération. Les références religieuses font généralement peur mais c’est avant tout la question de l’humanité et de l’élévation dont je me suis saisie.
Une élévation collective, avec des mouvements de groupes très harmonieux…
C’est une pièce qui m’est venue très facilement, sans avoir eu besoin de réfléchir. Je crois que je la portais en moi depuis longtemps. Elle nous emmène entre ciel et terre, dans cette élévation qui caractérise à la fois l’humanité et la danse. Lorsqu’on danse, on quitte le sol pour s’élever en sautant. De même pour notre esprit. Des spécialistes de Stravinsky, qui était un homme très pieux, m’ont dit qu’il aurait adoré cette chorégraphie. Cela m’a beaucoup touché.
Qui est Martin Harriague ?
Martin m’a appelé quand il avait dix-neuf ans. Il suivait des études de droit et voulait devenir danseur. Il a pris des cours avec un de mes amis à Bayonne puis a intégré le Ballet Biarritz Junior et a volé de ses propres ailes, notamment au Kibbutz Dance Company en Israël. En 2016, il a remporté plusieurs prix au Concours Jeunes Chorégraphes. Il est artiste associé depuis trois ans. Nous avons imaginé ce programme mixte autour de Stravinsky en répondant à la commande de Didier Deschamps pour le Théâtre de Chaillot.
Comment ressentez-vous sa chorégraphie du Sacre ?
Sa danse est très énergique et ancrée dans le sol. Martin s’est appuyé sur les intentions de Nicolas Roerich, peintre et ami de Stravinsky qui a participé à l’écriture de l’argument du Sacre, et met en avant les personnages de deux ancêtres. La première fois que j’ai vu sa pièce, je ne l’ai pas comprise. Je la trouve, aujourd’hui, très ingénieuse et singulière. Elle invite à un regard neuf sur ce ballet.
Propos recueillis par Vinciane Laumonier •
Entretien avec Laurence Equilbey, cheffe d’orchestre.
Que provoque en vous le Requiem de Fauré ?
Il ouvre un espace impressionnant, sacré, mais également humble et apaisé face à la mort. In Paradisum est mon mouvement préféré. Fauré invente l’apesanteur en musique.
Quelle est sa singularité ?
Il a beaucoup évolué au cours du temps. Fauré l’a retravaillé, tant dans sa structure, qui s’est peu à peu étoffée de nouveaux mouvements, que dans son orchestration. Cette dernière est au départ très légère, presque de l’ordre de la musique de chambre, et c’est surtout lorsque Fauré envisage de faire éditer le Requiem qu’il va le réviser pour le confier à un effectif orchestral plus habituel, dans cette version dite de 1900 que nous interprétons. D’autre part, c’est un Requiem qui prend le contrepied des canons du genre : presque tout y est apaisé, recueilli, loin de la douleur ou de la crainte du Jugement dernier. Une véritable « berceuse de la mort », selon ses propres mots.
Qu’apporte le film de Mat Collishaw à l’écoute de cette œuvre ?
Je cherche à relier la musique avec les arts plastiques pour certains projets et j’essaie toujours de faire résonner les œuvres du passé avec le présent. Ici, la combinaison de la musique sacrée de Fauré, jouée sur instruments d’époque avec le travail d’un vidéaste, m’a semblé être en osmose avec cette idée.
N’y a-t-il pas un contraste entre la musique planante et sereine et les images frontales et saisissantes du film ?
Avec ce film, la musique du Requiem semble écoutée par ceux-là même qui partent de notre terre. On retrouve ainsi la force de ce texte maintes fois entendu et cela nous permet d’interroger notre relation à notre propre humanité, à notre propre départ. Pour qui veut bien se laisser guider par cette proposition très forte et très organique, la symbiose entre le film de Collishaw et le Requiem apparaît de manière flagrante : le calme, l’apaisement des personnages et des paysages que montre Collishaw répond à la sérénité de la musique de Fauré, tandis que le dramatisme de la mise en musique des mots Dies Irae correspond par exemple à un climax de tension des images, dans lequel Collishaw évoque le rituel tibétain de l’enterrement céleste.
Christus de Mendelssohn peut-il être vécu comme un voyage extatique ?
Je le verrais plutôt comme une trajectoire, un panorama saisissant. De la vie du Christ ne subsistent que la Nativité et la Passion, les deux épisodes phares des Évangiles, moments d’intensité et de ferveur pour les chrétiens. Musicalement, on a presque l’impression de deux élans magistraux qui restent suspendus dans l’infini, de deux colonnes éblouissantes, d’autant plus poignantes que l’œuvre est demeurée inachevée.
Vous fêtez, avec nous, les 30 ans d’accentus. Quel sentiment vous anime ?
Un sentiment à la fois de fierté du chemin accompli, artistiquement et dans nos actions de transmission, et aussi de joie quand je pense à la résidence très profonde que nous menons à l’Opéra de Rouen Normandie et dans la région. Ce rapport avec le public et le territoire est unique.
Propos recueillis par Vinciane Laumonier.
Entretien avec Angelin Preljocaj, chorégraphe.
Vous ouvrez cette soirée par Annonciation. Quelle était votre intention pour ce duo féminin, devenu emblématique, entre Marie et l’ange Gabriel ?
Je voulais explorer ce que l’idée de religion a insufflé dans l’art, en quoi elle a été inspiratrice de créations fortes et d’œuvres nombreuses. Si la peinture s’est maintes fois posée sur l’Annonciation, la danse l’a quasiment évacuée. Le thème interroge pourtant le corps, son bouleversement, et parle aussi de rencontre et de naissance à venir. Par glissement, c’est aussi une réflexion sur l’art conceptuel que j’ai explorée.
La religion est-elle un sujet autour duquel vous aimez graviter ?
J’aime surtout revenir à l’idée que la racine religere signifie « relier », c’est-à-dire se nouer les uns aux autres.
Avec Torpeur, c’est une nouvelle création que vous nous offrez…
Je l’ai envisagée comme une articulation contrastée entre les deux pièces de répertoire. Si l’on aime le printemps, c’est aussi parce que l’on a traversé l’hiver. Le passage d’une saison nourrit le plaisir d’en aborder une autre et c’est la même chose avec un programme. Torpeur nous fait passer d’un état à un autre dans une forme de complémentarité et d’opposition. Elle s’éloigne de la douleur, invite à une forme de lâcher-prise, à un état de corps plus rond, et crée le désir d’une pièce comme Noces qui est touffue, énergique et sauvage.
Cet état de corps, l’éprouvez-vous vous-même au moment de la création ?
Dans ce cas, je n’étais pas dans un état de torpeur ! Mais lorsque je crée, je suis à fleur de peau et dans une auto-critique permanente par rapport à ce que j’essaie de montrer. C’est une hypersensibilité terrifiante qui peut être douloureuse et anxiogène mais qui n’exclut pas la jubilation.
Noces, que vous avez créé il y a plus de trente ans, garde toute sa férocité et son engagement physique. Elle résonne même de manière plus forte et directe aujourd’hui. Comment la ressentez-vous ?
Je vois bien, en effet, qu’elle trouve un écho plus aigu aujourd’hui où les questions de parité, d’équité et de violences faites aux femmes sont prégnantes. Elle a cependant, pour moi, toujours résonné de la même manière. Dès l’adolescence, je me suis inscrit en réaction à une culture patriarcale et à certains diktats familiaux oppressants. Noces était sans doute avant-gardiste sur le fond, mais c’est davantage sa forme et le jeu d’écriture avec la musique de Stravinsky qui avaient rencontré l’enthousiasme du public. Aujourd’hui, le plaisir de la forme et du fond convergent et j’en suis ravi.
Cette réflexion sur la forme semble soutenir votre travail…
Alors que la forme est parfois méprisée – ne dit-on pas « c’est formel ! » –, on n’a pourtant rien trouvé de mieux qu’elle pour exprimer le fond. Un contenu a besoin d’un contenant pour être porté et pour ne pas tomber dans le vide. Comment peut-on lire sur le corps telle émotion, telle idée ou tel état ? Comment peut-on lui donner une forme ? C’est ce qui me fascine.
Propos recueillis par Vinciane Laumonier •
Entretien avec Lucienne Renaudin Vary, trompettiste.
Le Concerto pour trompette de Hummel est l’une de vos œuvres fétiches. Quel lien avez-vous avec elle ?
C’est l’un des premiers concertos que j’ai joué à l’âge de dix ans et de nombreuses fois depuis. La trompette a un répertoire assez restreint et le Concerto de Hummel est un tube aux côtés de celui d’Haydn. Je crois que j’y puise un enthousiasme toujours renouvelé. À chaque interprétation, je découvre une humeur, un détail ou une énergie nouvelle soutenue par l’orchestre. C’est ainsi qu’on se rend compte qu’on joue un chef-d’œuvre !
C’est une œuvre plutôt optimiste. Comment la ressentez-vous ?
Lorsque j’interprète une œuvre, je ne vois pas d’images dans ma tête mais cherche plutôt à incarner des émotions. Et j’en ressens beaucoup avec ce concerto ! Le 2e mouvement est assez romantique. Même s’il est en mineur, il ouvre des passages lumineux, comme une trouée claire à travers les nuages. Le 3e mouvement est un véritable feu d’artifice !
Vous êtes, à vingt-quatre ans, une star de la trompette mais c’est un peu par hasard que vous vous êtes tournée vers cet instrument…
Tout à fait ! J’étudiais le piano au conservatoire du Mans et ne m’en réjouissais pas spécialement. Un jour, les professeurs de trompette sont venus présenter l’instrument dont les classes étaient désertées. Je l’ai immédiatement trouvée intrigante et originale. J’ai tout adoré d’elle et ai harcelé mes parents pour m’inscrire au cours.
Une sorte de boulimie trompettiste alors ?
Une passion immédiate à tel point que je jouais six heures par jour en plus de l’école ! Mes parents ont dû me confisquer l’embouchure pour calmer mon entrain. La trompette sollicite beaucoup les muscles de la bouche et les lèvres. Il faut s’aménager des pauses dans le travail pour éviter les claquages douloureux. Contrairement à ce que l’on pense, il n’est pas question de force et de souffle avec la trompette mais plutôt de gestion d’énergie et de respiration.
Qu’est-ce que la trompette vous a appris ?
Elle est ma vie. J’en joue, tous les jours, depuis que j’ai huit ans et je ne peux pas la dissocier de moi. J’ai l’impression de pouvoir aller n’importe où avec elle, du classique au jazz, de l’intime au partage. Si elle m’a appris une chose, c’est d’avoir le plaisir d’aimer ce que je fais !
Allez-vous jouer pieds nus, comme vous en avez l’habitude ?
Certainement ! Ça dépendra de ma tenue mais je vis à 80% pieds nus. Cela m’offre une stabilité, un ancrage dans le sol et la sensation d’éprouver davantage les vibrations de la musique. J’associe beaucoup la musique à la danse. J’ai fait sept ans de danse, un vrai bonheur qui m’a donné le goût du plateau, de la lumière et l’excitation de rencontrer un public.
Propos recueillis par Vinciane Laumonier.
Voir Carmen comme l’ont vu les spectateurs de 1875, c’est l’expérience unique qui vous est proposée à l’Opéra de Rouen Normandie !
Du 22 septembre au 3 octobre, vous aurez l’opportunité d’être plongés dans les décors d’époque, de voir les tous premiers costumes et la mise en scène originelle de Carmen, l’opéra français le plus joué dans le monde.
À très vite pour ce voyage dans le temps !
Christian Lacroix et les costumes de Carmen.
Dans son entretien riche en émotions, Christian Lacroix nous dévoile les secrets de confection des costumes de Carmen, dont certains seront les mêmes que la toute première Carmen de 1875 !
Il nous livre ses passions et son amour pour le beau grâce à un magnifique voyage dans le temps permettant de mieux comprendre l’histoire et l’origine des costumes de Carmen.
Depuis plus de 10 ans la SNCF Voyageurs Lignes Normandes soutient l’Opéra de Rouen Normandie.
Parce que nos valeurs se rejoignent, notamment sur la réduction de nos empreintes environnementales et sur le plan sociétal.
Parce que nous sommes très attachés à notre territoire, la Normandie, et qu’agir localement fait partie de nos priorités au quotidien.
Cette vidéo vous fera découvrir en images quelques-unes des actions mises en place pour réduire notre empreinte carbone.
Nous tenons à remercier tout particulièrement Juliette DE BEAUPUIS – DAUMAS, directrice des relations territoriales Lignes Normandes SNCF Voyageurs, Sophie Empis, Responsable Communication Externe et partenariats SNCF Voyageurs ainsi que Grégoire FORGEOT d’ARC, directeur des Lignes Normandes pour leur collaboration.
Entretien avec Romain Gilbert, metteur en scène de Carmen dans sa version de 1875.
Comment est la Carmen de 1875 que vous nous faites rencontrer dans cette production ?
Elle sort tout droit de l’imagination de Mérimée. C’est une femme déjà mariée mais libre et qui, comme Don José, est un personnage violent et sombre. Elle est manipulatrice, à la croisée de la Gitanilla de Cervantes et de la figure de la sorcière. C’est cette violence que j’aimerais que l’on retrouve. En revanche, reste une véritable histoire d’amour entre deux êtres que tout oppose.
Quelles étaient les particularités de la scénographie originale ?
Nous proposons de retrouver visuellement la version de la tournée de Carmen qui a suivi la première à l’Opéra Comique. C’est cette version, avec des récitatifs permettant son exploitation dans d’autres pays, qui a fait son succès. Avec Antoine Fontaine, nous nous sommes appuyés sur des planches et les premières photos de certains décors qui seront éclairés par Hervé Gary. Les dessins des costumes ont permis à Christian Lacroix de déployer son univers arlésien au plus près de la culture de la tauromachie. Notre travail avec Vincent Chaillet nous a plongé dans les danses espagnoles de l’époque.
Quels sont les défis d’un tel projet en termes de mise en scène ?
Le livret de mise en scène de 1875 indique les déplacements des grands ensembles, du chœur et des figurants. Nous essayons de reproduire également des annotations précises, « Carmen passe au n°1 » par exemple, pour les positions de certains solistes. J’ai donc des rails sur lesquels emmener le public, mais dont les nombreux manques doivent être comblés par l’imagination. J’ai également consulté des gravures de certaines scènes à mettre en regard avec cette production de 2023.
Ces contraintes historiques n’assèchent-elles pas votre créativité ?
Elles peuvent au contraire la nourrir. Il est fascinant de redécouvrir une façon de monter des opéras qui n’est plus la nôtre aujourd’hui et de mesurer le chemin parcouru. Certains usages ne feront plus effet, par exemple la pratique de « faire tableau » qui consistait à lever le rideau, au début de chaque acte, sur une scène figée. En revanche, il est intéressant de voir que la mobilité et le jeu théâtral du chœur, initiés dans Carmen en 1875, sont toujours d’actualité.
C’est aussi une plongée dans l’artisanat de l’époque…
Et une manière de redonner leurs lettres de noblesse à des métiers qui disparaissent ! Les modistes, perruquiers, entoileurs ou sculpteurs qui se font rares avec la modernisation de certaines mises en scène. Des peintres sur toile qui travaillent à l’italienne, c’est-à-dire debout avec de grands pinceaux, ont assuré une partie des décors.
Que souhaitez-vous transmettre de cette aventure ?
Faire ressentir l’émotion que tout un public a pu vivre à l’époque. Carmen est resté trois mois à l’affiche de l’Opéra Comique et a tenu trente-cinq représentations, ce qui est un succès malgré ce que la légende a retenu. La musique, inouïe à l’époque, ne nous surprend peut-être plus autant aujourd’hui mais retrouver ces effets visuels originaux est une source d’émerveillement.
Propos recueillis par Vinciane Laumonier.
Entretien avec Sidi Larbi Cherkaoui, Chorégraphe de Faun et Noetic
Peut-on envisager ces deux pièces comme un diptyque ?
Oui, elles sont très contrastées et proposent un grand écart entre deux mondes. Faun est dans l’intimité et l’animalité, Noetic se déploie dans la globalité, l’interconnexion et un aspect plus intellectuel. L’un, comme un conte sensuel ou un poème, revêt une part de féerie tandis que l’autre peut se lire comme une formule mathématique. Les deux se rejoignent dans une forme mystique de l’ordre de l’alchimie entre les êtres.
Ces créations montrent deux approches des corps très différentes. Les interprètes de Faun ne font qu’un corps alors que les femmes en talons et les hommes en costumes de Noetic sont très distingués…
Je voulais, avec Faun, être au plus près de ce que l’être humain peut faire rejaillir en tant qu’être animal faisant partie de la nature. Homme et femme sont similaires, se portent et se soutiennent mutuellement. Noetic est axé sur une société qui impose des codes binaires. Mais si vous regardez bien, les choses s’inversent peu à peu, certains hommes s’approprient une robe, des femmes empruntent un costume. Ils se regardent en miroir et jouent avec le genre dans un élan collectif.
De quoi partez-vous pour créer une pièce ?
De ce que le monde autour de moi me dicte. Avec Noetic, je voulais explorer cette connaissance intérieure profonde du monde et exprimer la connectivité des choses, cette sensation que l’on est un filament d’un grand tout. Chaque danseur tient une perche avec laquelle il se relie aux autres en créant un cercle, un globe qui ne tient que par l’ensemble du groupe. Avec Faun, c’est la musique de Debussy qui m’a guidée. J’ai voulu travailler le corps dans ses transformations animales et végétales constantes, du scorpion à la liane en passant par le chat, le singe ou l’ondulation du serpent.
Il y a une forme d’hypnose, de captation très forte du regard du spectateur dans ces deux créations. Est-ce ce que vous recherchez ?
Complètement. J’aime travailler des chorégraphies où l’on est happé, absorbé et emporté par le mouvement sans qu’on en sorte. Comme si l’on était en attente d’une fin. Je veux garder le public engagé dans ce qui se passe sur scène.
Vous travaillez aussi bien avec Beyoncé que sur la comédie musicale Starmania ou avec de grandes figures de la danse contemporaine. Par quoi êtes-vous guidé ?
Par la recherche d’un développement personnel et l’envie de me mettre au service du talent des autres. Réaliser le clip de Beyoncé m’a permis d’ouvrir mes connaissances techniques et de mettre en valeur le travail extraordinaire d’une femme noire en Amérique. La production musicale d’Alanis Morissette et Diane Paulus à Broadway m’a reconnecté à mes émotions de jeunesse, comme Starmania, dont la chanson Ziggy avait intimement résonné en moi en tant qu’adolescent homosexuel et qui est une tragédie prophétique d’une force incroyable. Dès que je sens une connexion avec un projet, j’aime le porter.
L’Opéra de Rouen Normandie met tout en œuvre pour encourager et faciliter la venue des personnes en situation de handicap. Une tarification adaptée, des dispositifs d’accompagnement spécifiques et des lieux accessibles permettent une découverte de la saison dans les meilleures conditions.
Gilets vibrants Pour ressentir pleinement les vibrations d’un opéra, d’un concert ou d’un spectacle de danse, l’Opéra de Rouen Normandie met à disposition des gilets SUBPAC pour certains spectacles sur réservation.
Séances en LSF Deux représentations de l’opéra participatif Cendrillon ou le Grand Hôtel des songes (dont une scolaire) seront interprétées en Langue des Signes Française par l’équipe de LIESSE. Rendez-vous sur notre site internet pour découvrir la vidéo des chœurs en chansigne, disponible avant les représentations.
Boucles magnétiques Des boucles magnétiques individuelles sont disponibles sur simple demande et permettent une amplification sonore des spectacles pour les personnes bénéficiant d’une assistance auditive avec position T.
Réservation SMS Les personnes présentant une déficience auditive peuvent réserver leurs places et leurs gilets vibrants par SMS au 07 81 15 36 09.
Surtitrage Un surtitrage en français est proposé pour tous les opéras.
Audiodescription En 2022-2023, cinq représentations sont audiodécrites en partenariat avec Accès Culture (Rigoletto, Le Voyage dans la Lune, Le Songe d’une nuit d’été, Serse, Roméo et Juliette). En amont de ces rendez-vous, nous proposons une visite tactile des décors et des costumes avec l’équipe artistique. Le jour du spectacle, le programme de salle est disponible en caractères agrandis et en braille.
Prochaine audiodescription : samedi 24 septembre, 18h autour de Rigoletto
Loupes Disponibles sur simple demande au vestiaire.
Des lieux adaptés Le Théâtre des Arts (entrée rue du docteur Rambert) et la Chapelle Corneille sont équipés de rampes d’accès et d’ascenseurs. Des emplacements spécifiques sont réservés aux personnes à mobilité réduite et leurs accompagnateurs.
Parcours de découverte En lien avec la programmation, ils sont proposés aux personnes présentant une déficience intellectuelle.
Votre interlocutrice privilégiée pour organiser des parcours, vous informer sur la programmation, faciliter votre venue : Angélina Prévost 07 81 15 36 09 angelinaprevost@operaderouen.fr